Personnel d’entretien et hauts cadres sollicitent l’intervention des autorités et exigent un plan social
Samsic Facility SA, entreprise de nettoyage qui emploie 260 personnes à Genève, et 250 autres à Bussigny, fait partie du Groupe Samsic qui occupe 125 000 salarié-e-s à l’international. Annonçant un chiffre d’affaires de 3,65 milliards d’euros, ce dernier déclare sur son site internet que « le capital humain est sa plus grande richesse ».
A Genève, Samsic Facility SA n’a manifestement pas la même vision de la richesse de ce capital. En effet, à la suite d’un grave conflit interne, l’ancienne direction, appréciée par son personnel, a été licenciée et remplacée par de nouveaux dirigeants aux pratiques managériales brutales. Les conséquences se sont traduites par une détérioration immédiate et inacceptable des conditions de travail du personnel d’entretien, et un licenciement collectif déguisé pour des motifs économiques fallacieux, touchant plus d’une trentaine de collaborateurs-rices.
Scandalisé-e-s et fortement impactés par la situation, de manière aussi inédite qu’exemplaire, cadres et personnel d’entretien se sont mobilisé-e-s ensemble pour défendre leurs droits et dénoncer des pratiques indignes d’une entreprise active sur les marchés publics (licenciements abusifs, pressions psychologiques, harcèlement, abus d’autorité, insultes, menaces, discriminations de genre et en lien avec l’âge, etc.). Après avoir tenté en vain de négocier des solutions visant à rétablir leurs droits avec la nouvelle direction, après avoir été victimes de tentatives de contrainte par l’avocat de cette dernière – dont des atteintes graves à leurs droits syndicaux – ils-elles ont décidé de saisir simultanément l’OCIRT et l’OCE. Le premier sous l’angle du respect des dépositions légales en matière de protection de la santé et de la personnalité du personnel. Le second sur les procédures à respecter en cas de licenciement collectif et de l’obligation de négocier un plan social pour les entreprises de plus de 250 personnes qui licencient 30 personnes et plus.
Parallèlement à ces procédures, ils-elles ont décidé de demander également l’intervention du fondateur du Groupe Samsic, Monsieur Christian Roulleau, auprès de la nouvelle direction de Samsic Facility SA, afin que leurs droits soient respectés. Le personnel compte sur ce dernier pour user de son influence et faire appliquer la devise et les valeurs du groupe. Et ce, sachant qu’avec une fortune de plus d’un milliard d’euros, Christian Roulleau compte parmi les personnes les plus riches de France.
Devant les médias ce matin, une quinzaine d’employé-e-s et d’ex-employé-e-s ont également dénoncé les dessous de cette affaire à travers leurs témoignages. A n’en pas douter, il s’agit d’un véritable scandale. Ainsi, Elena nettoyeuse depuis 3 ans, dénonce l’attitude inacceptable et déplacée de son responsable qui hormis la pression habituelle lançait régulièrement à l’attention des employé-e-s seniors : « mettez-moi dehors ces vieilles, amenez-moi des jeunes ». Ce même responsable se moquant du physique et des problèmes de santé de certain-e-s membres du personnel, lançant dans le dos d’un collègue malade « dès qu’il rentre celui-ci on va le licencier comme un chien ». Un mépris adopté par la nouvelle direction qui convoque Ricardo, responsable de site, pour signer l’avenant de son contrat, et qui lui jette à la figure « Ricardo, c’est toi le portugais ? T’es content ? T’es viré ! »
L’ancien directeur de Samsic Facility SA Suisse s’indigne du traitement infligé à l’ancienne direction, ainsi que de l’ensemble de ses collègues : « nous avons travaillé sans ménager nos efforts pour mettre en place une politique d’entreprise et des conditions de travail exemplaires. Avec une attention toute particulière à la notion d’égalité entre femmes et hommes, au respect de la personnalité et de la santé du personnel, pour répondre aux exigences de l’OCIRT. Alors qu’en raison d’une mauvaise gestion de la société antérieure à notre arrivée elle était dans le collimateur de ce dernier avec le risque d’être exclu des marchés publics. Aujourd’hui, nous sommes sacrifiés pour des motifs de lutte de pouvoir basée sur une manipulation des chiffres. Au moment de notre licenciement, les résultats financiers de l’établissement de Genève étaient excellents et en ligne avec l’exercice budgétaire 2024. Ils portaient les résultats de l’ensemble du groupe en Suisse ». Sa collègue, Angélique, ex-contract manager, abonde dans son sens et ajoute « en marge de la mise sur pied de cette politique d’entreprise respectueuse du personnel, nous avons pérennisé l’ensemble des contrats et fidélisé nos clients, parmi lesquelles figurent d’importantes sociétés ou institutions publiques, telles que le CERN, les TPG, le MEG, la banque JP Morgan, la SGIPA, Audemars Piguet, Merk Serono, l’école internationale et le Collège du Léman ou encore Expédia. Et nous avons aussi optimisé les marges de ces derniers ».
Le personnel a annoncé devant la presse qu’il était déterminé à obtenir gain de cause. Il compte notamment sur la direction de l’OCE, qui n’a toujours pas répondu à sa demande, d’organiser une rencontre entre les parties pour débuter des négociations visant à obtenir un plan social à la hauteur des préjudices subis. Dans le cas contraire, il passera à la vitesse supérieure et saisira la commission de surveillance des marchés publics, en vue d’une une exclusion de Samsic Facility SA des marchés publics pour violation grave des conditions de travail.
Le mot de la fin revient à Antonio, nettoyeur, qui conclut devant les journalistes : « nous avons été maltraités, humiliés, nos relevés d’heures ont été parfois trafiqués, nos plannings régulièrement changés à la dernière minute, en violation avec la loi sur le Travail, pour finalement être jetés comme des Kleenex. Nous ne nous laisserons pas faire. Notre lutte est juste, et elle est d’ailleurs soutenue par plusieurs dizaines d’employé-e-s de nos clients qui ont signé une pétition pour nous soutenir ».
Annexes :
résolution du personnel
courriers à l’OCIRT, à l’OCE et au fondateur de l’entreprise