Grève des EdS de Partage à son 30ème jour. La CRCT saisie, que font les grévistes ?

Faire cesser une grève qui dérange

Le DSE a décidé de faire fi des demandes et arguments du SIT et de saisir la Chambre des relations collectives de travail (CRCT). Le SIT considère que la saisie de cette instance n’est pas indiquée dans ce conflit, si ce n’est pour faire cesser les moyens de lutte et de médiatisation d’une grève qui dérange car elle démontre avec force que la mesure « phare » de la politiques cantonale en matière de chômage est plus un leurre à fabriquer du dumping salarial et à externaliser des tâches publiques qu’un tremplin vers l’insertion. Le recours à la Chambre dans le cas de Partage n’est pas indiqué car la mission de la Chambre est de prévenir et de concilier les différends d’ordre collectif d’un conflit concernant les conditions de travail tels le montant de l’indexation ou l’ampleur d’un plan social.

La protection de la personnalité n’est pas négociable

Le conflit chez Partage n’est pas un conflit collectif au sens classique du terme, puisque les grévistes ne demandent pas à l’employeur un changement des conditions de travail, mais l’application du droit quant au respect de leur personnalité. La question de la protection de la personnalité a ceci de particulier qu’elle n’est pas « négociable ». S’il y a atteinte aux droits de la personnalité, la loi indique que l’employeur doit tout simplement la faire cesser. Saisie d’une requête dans ce domaine et pour proposer une conciliation, voire émettre des recommandations, que peut faire la CRCT ? Elle devrait d’abord établir les faits. Pour ce faire, elle pourrait donc être amenée à ordonner une enquête pour entendre les membres du personnel, la hiérarchie, etc. ; ce qui reviendrait à ce que le SIT demande à l’OCE depuis le 26 août.

Pour le SIT, le recours à la CRCT dans le seul but de faire cesser une grève est abusif s’il n’y a pas, parallèlement, de volonté de l’employeur – voire de l’OCE en tant qu’autorité décisionnaire en matière d’établissement de la convention de collaboration mettant des EdS à disposition de Partage – d’aboutir à une solution. L’Etat devra donc montrer qu’il est déterminé à trouver des solutions, à commencer par garantir la protection de la santé et de la personnalité des travailleurs et prendre des mesures à cette fin.

Aujourd’hui, 20 septembre, le SIT n’a reçu aucune convocation officielle. Toutefois, depuis le 17 septembre, les grévistes ont déjà largement débattu de l’annonce du DSE de saisir la Chambre.

Confrontés à l’injonction de la Chambre de cesser les moyens de lutte et de médiatisation, que feront les grévistes ?

Les grévistes n’ont pas le choix : ils ne peuvent pas retourner au travail

Face à l’injonction de devoir cesser tous moyens de lutte et de médiatisation, les grévistes ont décidé non pas de désobéir, mais de se protéger. Depuis de nombreux mois, ils subissent une méthode de management despotique de la part de la direction de Partage basée sur les menaces et la pression.

La concordance des nombreux témoignages recueillis à ce sujet sont particulièrement révélateurs.


“…lorsque nous sommes malades, nous sommes systématiquement menacés de licenciement et accusés d’être des simulateurs malgré nos certificats médicaux… »

« …alors que nous travaillons du lundi au vendredi, le travail du week-end est quasiment obligatoire. On nous demande souvent à la dernière minute de travailler le samedi et le dimanche. Nous ne pouvons jamais refuser même en cas de force majeure car on est immédiatement menacé de licenciement… »

« …on subit les mêmes menaces quand il s’agit de récupérer ces heures supplémentaires en temps. Nous n’avons jamais notre mot à dire pour la prise des congés. Partage nous les impose au compte-gouttes à des périodes qui ne nous conviennent pas ou fractionnés en demi-journée… »

« …lors de la dernière Fête de la tomate à Carouge, certains d’entre nous n’ont pas eu le choix d’effectuer des horaires démentiels. Après avoir travaillé toute la semaine, ils ont terminé le vendredi à 23heures pour reprendre leur travail le samedi matin à 2h00 et travailler jusqu’à 5h00. Ils ont encore travaillé le dimanche de 13h00 à minuit… »

« …Partage ne nous porte aucune considération. Nous subissons régulièrement des insultes du style vous n’êtes que des marginaux et si vous n’êtes pas contents, vous n’avez qu’à prendre la porte… »

« …après des discussions concernant les horaires de travail et le travail du dimanche, j’ai reçu une menace de licenciement par sms, que j’ai gardé »

« …certains de nos collègues se sont vu refuser leur prise de vacances au dernier moment alors qu’elles avaient été acceptées. Certains n’ont pas pu partir avec leurs enfants, d’autres ont perdu billets et réservation… »

« …les cyclotris sont presque tous défaillants, les batteries à plat, les pneus crevés car on transporte 250 kg, le travail est physiquement très pénible, il bousille notre dos, c’est déjà de la maltraitance de ne pas mettre à disposition du matériel adéquat. Idem avec les habits de travail… »

« … un de nos collègues vient de démissionner car il ne supportait plus la pression… »


Une suspension collective du travail pour protéger leur personnalité

Ces témoignages démontrent que les grévistes n’ont pas d’autre choix que celui de ne pas retourner travailler. Leur choix est d’autant plus compréhensible que Partage n’a jusqu’ici jamais reconnu une quelconque responsabilité dans ce climat de travail délétère.

Dans ces conditions, face au non respect des conditions de travail par l’employeur (notamment concernant le respect et la protection de la personnalité) et sans aucune mesure prise par Partage, par l’OCE et par le DSE pour garantir un climat de travail sécurisé pour le personnel, il est aisé de comprendre que les employés de Partage ne puissent retourner sur leur lieu de travail. Dès l’injonction de la Chambre, le personnel continuera à se réunir tous les jours et mener ses actions. Il ne s’agira plus d’une grève classique portant sur un changement du droit, mais d’une suspension collective des rapports de travail pour protéger leur personnalité.

Lien vers la version imprimable

Cliquez ici pour retrouver toute l’actualité sur la grève des EdS